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Autodidacte, je commence par une peinture naïve inspirée de la vie quotidienne du sud tunisien, puis dans une deuxième période je me dirige vers un orientalisme libéré de tout conformisme et mêlé d’audace chromatique et de  fauvisme, enfin je me suis orientée progressivement vers l’abstraction et la matérialité de l’oeuvre. Aujourd’hui mes sujets sont à peine évoqués au profit des jeux de matières et de couleurs. Mon engagement en tant que femme, artiste et tunisienne est un triptyque qui ne pouvait que m’entraîner vers des combats sociaux ...

 

    Expositions :

 

 -  Mars 2008,  exposition à Strasbourg  a l’ Instituto         Italiano di Cultura - France

 

 -  Mars 2011,  exposition  à  Berlin (ITB) - Allemagne

 

 -  Mai 2012,  exposition au festival  d’art                           contemporain « le Printemps de  Musées », au            Beaux- de Provences - France

 

Le Djerid, où s’éclot l’œuvre de Raoudha Bribech, est baigné d’une lumière forte, intense, qui masque aux yeux des voyageurs pressés l’infinie profusion des nuances. La nature y marie l’aridité des déserts et la douceur des jardins d’oasis où l’ombre et le soleil se taquinent sous les palmes. Partout se mêlent les ocres rudes et les tendres verdures, partout surgit l’inattendu : le cours limpide de la seguia, l’empreinte légère que gardera le sable l’espace d’un matin, les effluves des roses sauvages que libère le soleil de midi.

 

Peindre est ici une gageure. Comment retenir sur la toile les éclats de cette luminosité violente qui écrase la nature ? Comment évoquer les hommes et les femmes de cette terre où la vie est rude, où chaque jour l’oasis rappelle la fragilité de l’existence au milieu d’une hostile immensité ?

 

 

Raoudha Bribech a  choisi d’aller là où la conduisait sa sensibilité hors pair et sa passion pour Tozeur. De ses traditions, de son savoir-faire, des merveilles qui naissent des mains des artisans, elle a tout observé : les anciens décors de brique des maisons de la médina dont l’origine se perd dans la nuit des siècles, la clarté des voûtes qui soudain s’ouvrent sur le ciel saharien, les portes de palmier décorées et cloutées qui marquent la grande césure entre la famille et la ville. Tout cela l’a nourri et inspiré. Nantie de cette solide connaissance, elle a cheminé dans la solitude de sa création mais dans une intimité constante avec les paysages et les hommes qui l’ont façonné. Son travail est ancré dans son pays. Il l’exprime comme le fruit d’un terroir

 

Le jaillissement et la stridence des couleurs qui illuminent son œuvre actuelle se trouvaient déjà en germe dans les tableaux de ses commencements. Sa palette a d’emblée pris la maîtrise de sa toile. La gaîté d’une jeune fille souriante s’exprime par de précises harmonies, où le dessin est au service de la couleur, livrant alors un portrait chaleureux aux teintes de vitrail. Ses portraits ne se bercent pas d’illusion : les secrets restent bien gardés à Tozeur, et les visages que trace Raoudha Bribech ne se livrent pas d’emblée. Leur intériorité est toujours saisissante et la vraie vie ne s’étale pas au dehors.


 

 

 

Peut-être poursuit-elle là sur la toile le poème d’un fils exceptionnel de Tozeur, ce grand poète mort à l’âge de vingt-cinq ans, Abou El Kacem Chebbi :

 

 

 

« Exquise tu es comme l’enfance, comme les rêves,

Comme la musique, comme le matin nouveau,

Comme le ciel rieur, comme la nuit de pleine lune,

Comme les fleurs, comme le sourire d’un enfant »

 

 

 

**** Citations **** 

Exquises en effet, elles rayonnent dans ces toiles, par leur sourire, par leur sérénité, par leur grâce et par leur sentiment du devoir perceptible dans leur visage impénétrable. Gardiennes, dans les joies et les peines, d’une culture forte née de la victoire quotidienne sur les défis du désert. Gardiennes de la tradition pour l’exécution des tapis et des tissages, où des motifs survivent intacts, si semblables aux décors créés voici deux millénaires par les civilisations libyques et berbères. Mais aussi, porteuses de l’avenir et conquérantes des libertés. Les femmes de Tunisie et les femmes du Djerid méritent ce bel hommage pictural.

 

 

 

                                                       Jean-Yves Autexier

Lorsqu’elle peint la ville et l’oasis, très vite, elle se libère des contraintes du conformisme ; ses ciels rouges sont les plus fidèles à l’ardeur de l’air écrasé de soleil ; sa palette fauve dit mieux que tout la chaleur qui enveloppe cet univers. Le désert, ses dromadaires et ses chameliers, à mille lieues des clichés, imposent leur rudesse au regard. Et plus tard, son travail affranchi du figuratif poursuivra dans cette voie : la couleur imprime son mouvement à la toile, la lumière seule définit les formes, sculpte les silhouettes. Inspirées de l’élégant mouvement des femmes de Tozeur ajustant leur voile noir, al malhafa al kahla comme le nomment les gens du Djérid, ces profils glissants et tournoyants nous ouvrent l’accès à l’une des clés de son œuvre : Raoudha Bribech veut rendre hommage aux femmes du Djerid.

A travers les scènes typiques de la vie quotidienne du sud tunisien, Raoudha  Bribech montre une très grande liberté dans la création et l’expression de sa voie propre. Elle revendique l’expression d’un authentique art fondé sur une thématique d’inspiration populaire et traditionnelle. Toutefois la magie du pinceau de cette  peintre tunisienne sait faire passer un souffle de modernité qui exalte alors la scène proposée. La composition de cette artiste qu’elle soit avec les couleurs dans un élan de liberté pour servir la lumière. Imprégnée de la lumière de son pays Raoudha a quelques  valeurs obsédantes : le noir, le bistre, le fauve, l’ocre rouge. Et dans  ses plus hauts moments une intransigeante austérité.

 

Ce qui compte avant tout, c’est son appartenance méditerranéenne avec les pulsions de la beauté orangée. Silencieuse et discrète qu’elle met en exergue par un trait quasi rituel elle veut faire passer son message  de femme attentive au monde qui l’entoure .Sa vision  extraordinairement éclairée suit les méandres de son imagination qui sait créer des œuvres vivantes.

 

D’une main légère et d’un trait poétique, son affectivité  transmet  une vision  sensible a cette lumière incroyable et de l’indéfinissable atmosphère de sa région. Son pays la  provoque, la force à oser : le soleil qui dévore les ombres, le ciel toujours bleu, les couleurs de la médina incendiées.







 

 

La partie de cette artiste nous rappelle le mot du grand portraitiste  Bill Briant quand il parle d’envoûtement : «Ce mot qui ne nous quitte  pas  face à des images hantées par les orages de lumière et le ruissellement de l’ombre » Avec sa palette, Raoudha  passe l’épreuve du feu colorisé. Ses couleurs deviennent des cartouches de dynamite, déchargeant de la lumière.La permanence des briques ocres qui surgissent de la médina éblouissante d’émeraude, autant de travail pictural qui dit un combat mené jour et nuit dans une solitude que Staël qualifiait «d’inhumaine».

 

 

Son style issu d’une étude profonde, sincère, féminine de la nature du sud tunisien rompt avec toute idéalisation .Il permet de conférer aux êtres et aux choses une forte intensité en mettant en œuvre sa riche technique de sous–couches et d’une pâte  épaisse. Colorée, la peinture de Raoudha arrive à plus haute sérénité  par la simplification des idées et des moyens plastiques. Cette attitude dans la création picturale donne une image volontariste de la femme du sud et surtout proclame son amour pour sa ville Tozeur.

 

Raoudha est pétrie de la même matière que la terre qui la porte .En secret elle psalmodie son poète, Abou El kacem Chebbi, le Rimbaud tunisien : 


« Je voudrais n’avoir jamais cessé d’être ce que j’étais : une lumière répandue sur toute l’existence ».

 

                                                                                                                                                    Gérard  CARDONNE

 

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